En manque d’inspiration par Chris Pratt

Les jours et les nuits se suivent et ne se ressemblent pas sur cette Transat Jacques Vabre 2023. 

Je n’ai pas le temps de m’ennuyer, pas même le temps de vagabonder dans mes vies antérieures lors des quarts nocturnes ! (NDLR Christopher fait ici référence au roman de Jack London, Le vagabond des étoiles, dans lequel Darrell Standing enfermé dans sa cellule voyage dans ses vies antérieures pour survivre à l’enfermement).

Nous venons d’empanner. Il fait nuit noire et dans notre cockpit – qui ressemble plus à celui d’un avion que d’un bateau – les écrans rouges et blancs illuminent l’habitacle.

Les chiffres défilent sous mes yeux. Enfin, on trouve “la speed”, un peu comme hier soir à la même heure ; à croire que nous sommes des animaux nocturnes avec Max. Nous venons d’empanner pour faire route vers l’Ouest. Plus exactement, nous allons commencer à nous rapprocher du but : traverser l’Atlantique à proprement parler.

Je me sens en manque. De quoi me direz-vous ? En manque de vagabondage, en manque de contemplation, en manque d’inspiration stratégique un peu aussi…. 

Ces premiers jours de course sont un peu frustrants. Nous n’arrivons pas à dérouler nos plans comme nous l’aimerions. J’ai l’impression que nous nous retrouvons un peu à contretemps. Alors, nous subissons la loi des éléments, mais aussi celle de nos adversaires.

Il faut dire que cette transat en IMOCA : c’est la course du millénaire. Nous voilà projetés au milieu d’un plateau d’une densité incroyable, avec des bateaux parfaitement optimisés et la crème de la crème de la course au large. Nous sommes en F1, et comme me le rappelle Max à juste titre : quand tu es une petite écurie comme nous, il faut jouer des coudes pour être dans les points. Attention, le dragon n’a pas dit son dernier mot. Il rugit comme jamais (comprenez le bruit des foils est assourdissant) content lui aussi de faire route vers le but. 

Côté vagabondage métaphysique, c’est un peu la panne aussi. Heureusement, j’ai mes podcasts. J’en écoute beaucoup à terre, mais ici, c’est durant plusieurs heures par jour. Les thèmes sont éclectiques. À titre d’illustration, je méditais sur cette phrase de Joël Dupuch, l’ostréiculteur des petits mouchoirs : « c’est très dur de savoir ce que tu veux faire dans la vie, en revanche, avec l’âge, tu apprends à savoir ce que tu ne veux pas ou plus faire ! » J’ai aussi réfléchi pendant l’émission d’Eva Bester (c’est ma chouchou en ce moment) sur cette citation de Joyce Carol : « Quoi que vous fassiez, que vous le fassiez seule ou non, à quelque moment que vous le fassiez, de quelque façon que vous le fassiez, pour quelque raison que vous le fassiez, quelque mystérieux soit le but dans lequel vous le fassiez, n'oubliez jamais que sur l'autre tableau de la balance il y a toujours le néant ». J’adore cette phrase. Je m’y raccroche souvent. J’écoutais encore Tony Parker au micro de My Better Self expliquer que l’enseignement le plus important qu’il souhaite transmettre à ses enfants est : « be kind ». Côté sportif, je me plongeais avec attention dans l’histoire de la folle victoire de la bande à Noah en coupe Davis, quand Yannick va chercher Henri Leconte et le fait renaître de ses cendres en deux mois pour terrasser presque à lui seul les Américains grands favoris… 

Il est des gens et des parcours inspirants et extraordinaires. S’il fallait y trouver un sens, je me risquerais à dire que le point commun de toutes ces personnes dans tous ces mondes différents : art, entrepreneuriat ou sport, c’est l’envie ! Ce qui guide les succès, c’est l’envie de faire quoiqu’il en coûte et sans se soucier du résultat.

© Gauthier Lebec

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